Auteure engagée dans la protection de l'enfance et la lutte contre l'omerta qu'est l'inceste - Par Karine Béghin

Inceste : pourquoi la famille se tait

Le silence de la famille

 
Souvent le tabou se répète au niveau générationnel. Il est assez fréquent que d'autres membres de la famille aient subi des violences sexuelles sur plusieurs générations. Tout le monde est ainsi élevé pour se taire, c'est un schéma familial où le silence est inscrit dans le fonctionnement de chacun de façon inconsciente. 
 
C'est tellement honteux et malaisant que tout le monde se tait, alors même que la situation est si grave et que seule la parole pourrait y mettre fin, le silence s'installe. Ou plutôt il perdure, car si l'on regarde bien, il était déjà là, dans un système familial où la parole est peu présente dès qu'il s'agit d'exprimer ses propres ressentis, ses sentiments, ses émotions, son amour ou ses tourments. 
 
Quand les victimes parlent, fréquemment, il ne se passe donc rien. Les membres de ces familles bancales privilégient leur propre protection à celle de l'enfant et entrent dans une forme de déni : ces adultes ne protègent pas car ils n'en sont simplement pas capables. Outre un probable passé incestueux dans la famille, le déni est souvent présent car le fait de révéler les faits expose ses membres à un éclatement familial et à un dévoilement potentiel de l'histoire en public. Dans le cas où l'agresseur est le "chef de famille" (père ou beau-père) la mère peut aussi se sentir accablée par la honte et se retrouver confrontée à un dilemme : parler l'amènerai à devoir quitter sa dépendance, affective et/ou financière, à l'égard de cet homme.

Quand on est de l'autre côté, on a beau comprendre les mécanismes qui peuvent mener insidieusement jusqu'au silence d'une famille entière, il n'en reste pas moins que nous devons nous reconstruire petit à petit. On ne changera pas ce qu'il s'est passé, mais pour aller mieux, arrêtons de nous taire. Pour moi un seul remède : la parole, l'écriture, les mots ! 

Karine

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